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Chantal JAMET

Médiation

 

MEDIATEURE Près la Cour d'Appel, agréée FFCM, CNMA, Avocate honoraire,

Formatrice certifiée QUALIOPI

Adoptez le réflexe "Médiation"!

L’Empathie et la Médiation

par | Avr 23, 2019 | 0 commentaires

Publié le 23/04/2019 par Chantal51jamet


On parle beaucoup de l’empathie comme d’une qualité nécessaire au Médiateur pour pouvoir faire des médiations, voire l’enseigner. Mais qu’est-ce, à quoi ça sert et est-ce seulement utile en médiation ?

✓ Qu’est ce que l’empathie ?

Jacques Lecomte d’écrit l’empathie comme la faculté que possède un individu de « se mettre à la place d’un autre », en ressentant ce qu’il ressent ou en pensant ce qu’il pense comme s’il était lui.

Elle ne peut être confondue avec la sympathie qui consiste à partager avec l’autre, éprouver comme lui, ou la compassion qui signifie souffrir avec l’autre.

Matthieu Ricard, docteur en génétique cellulaire, moine bouddhiste, philosophe, écrivain, dépeint l’empathie comme la « résonance affective avec l’autre ». Il lui paraît nécessaire de doubler l’empathie de la bienveillance pour ne pas sombrer avec celui que l’on veut soutenir.

Il distingue deux formes d’empathie : convergente et divergente. Avec l’une, le tiers compatit (souffre avec l’autre), il perçoit le problème sans être lui-même affligé. Il considère la seconde plus productive que la première car elle permet de garder de la distance par rapport aux émotions de l’autre.

Une personne empathique est en capacité d’accueillir la souffrance d’un être sans en être personnellement affectée.

Carl Rogers, psychologue et psychothérapeute américain, démontre que l’empathie, la compréhension empathique, consiste à percevoir correctement le cadre de référence d’autrui, avec les valeurs personnelles qui s’y rattachent. Percevoir de manière empathique, c’est percevoir le monde subjectif d’autrui « comme si  » on était cette personne, sans toutefois perdre de vue qu’il s’agit d’une situation imaginaire.

Ce psychologue précise que la capacité empathique implique qu’on éprouve la peine ou le plaisir d’autrui comme il l’éprouve, et qu’on en perçoive la cause comme il la perçoit – on explique ses sentiments ou ses perceptions comme il se les explique- sans jamais oublier qu’il s’agit des expériences et des perceptions d’autrui.

Si cette dernière condition est absente ou disparaît, il ne s’agit plus d’empathie mais d’identification, ce qui est contreproductif en médiation.
On distingue encore l’empathie émotionnelle, l’empathie cognitive et l’empathie comportementale. La première est commandée par nos émotions, la deuxième par notre savoir, la troisième par nos comportements individuels et sociaux.

Serge Tisseron, psychiatre et psychanalyste, voit encore « trois étages » dans l’empathie : l’empathie directe, l’empathie réciproque et l’intersubjectivité.
L’empathie directe contient à la fois l’empathie émotionnelle et l’empathie cognitive. L’empathie émotionnelle est acquise dès la naissance. Elle existe chez l’animal et chez l’homme. Elle se caractérise par une réaction immédiate, instinctive face à la douleur, à la joie, à la peine de l’autre. On comprend ce que ressent l’autre.

L’empathie cognitive est plus réfléchie. Il s’agit de la perception intellectuelle des états mentaux d’autrui. Cette prédisposition existe dès l’âge de quatre ans chez l’enfant qui perçoit ce que pense l’autre.

L’empathie réciproque est une perception mutuelle entre des êtres vivants.

L’empathie peut se doubler de l’intersubjectivité qui est une influence réciproque entre des personnes ou des groupes.

✓ A quoi sert l’empathie en médiation ?

Elle sert au médiateur à être à la fois suffisamment proche du ressenti des médieurs et, dans le même temps, à garder une distance vis-à-vis de leur problème. Il ne doit pas s’identifier à eux et garder une distance suffisante pour pouvoir les aider efficacement.

Cette attitude de distanciation lui permet d’être à l’écoute des médieurs sans être affecté personnellement par leurs ressentis et sans q’ils perçoivent son empathie comme un soutien personnel qui ne ferait qu’aggraver leur colère, leur désarroi, leur exubérance à l’encontre de celui ou de celle qui est, pour l’heure, leur adversaire. Mieux qu’un allié, il les comprend, les reçoit sans réserve, sans arrière-pensée autre que celle de les aider à mieux communiquer entre eux.

✓ Comment s’en servir en médiation ?

Le médiateur utilise l’empathie comportementale en « copiant » les gestes, attitudes et, si cela est possible, la tonalité de voix des participants, lorsqu’il reformule les propos de l’un, puis de l’autre.

C’est ce que Jacques Lecomte appelle « le mimétisme comportemental » que l’on pratique inconsciemment avec une personne que l’on apprécie, que l’on aime.

Il ne s’agit pas pour le médiateur de copier systématiquement les participants qui risquent, s’il le fait maladroitement, de penser qu’il se moque d’eux. Par ce moyen, il tente de comprendre ce que pense le médieur, de ressentir ce qu’il ressent, de percevoir quels sont ses besoins, ses valeurs, ce qu’il appréhende.

✓ L’empathie n’est pas qu’un outil…

L’empathie n’est pas qu’un outil de l’éthique du médiateur. C’est aussi une manière d’être.

Être empathique peut être une manière d’être instinctive : on est proche de tout ce qui est vivant, on ressent les êtres vivants de façon instinctive. Ce peut être inné. Mais souvent cette graine est enfouie comme en état de sommeil au fond de chacun de nous. Alors comme tout, cela s’apprend, cela se cultive. Au début, cela nécessite des efforts, de l’entraînement. Il faut se concentrer, se forcer, chercher la bonne attitude, le bon rythme, le bon souffle…. Puis, c’est tellement plus agréable d’être ouvert aux autres, d’être « open » comme on dit aujourd’hui, qu’on prend vite l’habitude de ce qui fait du bien. On recherche alors notre attitude empathique lors d’une rencontre, d’un rendez-vous, d’une mission de médiation… lors de toute rencontre avec l’Autre.

Cette attitude devient un moule dans lequel on entre de mieux en mieux. Puis de moule cela devient une deuxième peau pour devenir un état.

Bien sûr, ce n’est pas permanent. Nous ne sommes que des humains après tout. Comme tout un chacun, j’ai mes colères, mes joies, mes peines, mes problèmes. Un jour pourtant, je me suis finalement rendue compte que ces colères, ces retenues, ces apriori, me fatiguaient, me bridaient, m’empêchaient d’atteindre un état plus agréable, plus vivant, qui me correspondait davantage et que je cherchais sans m’en rendre compte depuis bien longtemps.

Essayer d’être en empathie avec les gens, qui ne sont ni plus ni moins mauvais que moi, savoir les regarder autrement. Non par le truchement de mon ego mais par ce que mon esprit, mon cœur ressent. Et puis… La sensation de respirer mieux, de vivre de façon plus authentique, non dictée par les humeurs de mon égo esclavagiste ! Un étau qui se desserre… Quand vous réalisez cela, vous n’avez qu’une hâte, qu’une envie, retrouver cet état, ce chemin de l’empathie, qui vous rend plus léger et plus souple aussi, comme si votre carapace avait perdu en épaisseur, vous permettant de faire le grand écart, comme si le masque était tombé.

L’empathie c’est une libération de soi par rapport à soi et par rapport aux autres. Pouvoir percevoir ce qui nous entoure de façon intense et pourtant sans maquillage, tel quel, pas à la façon d’un égo tyrannique.

Être empathique, c’est la sensation de mieux entendre, de mieux voir, de mieux sentir, de mieux toucher, de mieux goûter, les êtres et les choses. Sachant qu’il fait partie d’un tout universel et unique où tout est relié, le médiateur utilisera ses cinq sens pour prendre la juste mesure de ceux qu’il va aider et de leur problème.

C’est aussi cela l’empathie : savoir que nous dépendons les uns des autres, que nous avons intérêt à comprendre que les besoins des uns sont le corollaire de ceux des autres, que nous vivons ensemble pour vivre le meilleur et non le pire.